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L’Homme façonné par les virus

L’Homme façonné par les virus
Odile Jacob 298 pages
1 critique de lecteur

Avis de Patricia : "Ils ne mouraient pas tous mais tous étaient frappés (Jean de La Fontaine)"

Cet ouvrage, sous-titré Le covid-19 et la découverte d’un vaccin français  sort juste après l'abandon par l'Institut Pasteur de son candidat vaccin de première génération contre le covid-19. Frédéric Tangy travaille à l’école du Val-de-Grâce, destinée à former les médecins des armées. Jean-Nicolas Tournier est le patron du labo d’innovation vaccinale de l’Institut Pasteur alors que Bruno Hoen, qui a lui aussi communiqué sur l’abandon de ce vaccin, est le directeur de la recherche médicale du même institut.

Le contenu commence par rappeler concrètement combien les autorités chinoises firent tout pour masquer les débuts de l’épidémie du corinavirus. Le second chapitre évoque en particulier Louis Pasteur et Robert Koch pour leurs travaux autour des maladies infectieuses et un mot est dit sur Élie Metchnikoff qui identifia les phagocytes, des globules blancs qui tuent les germes pathogènes. On poursuit en parlant d’infections parfois asymptomatiques et d’anticorps absents chez certains sujets (page 36).

On retiendra que : « les généticiens qui travaillent sur la susceptibilité aux maladies infectieuses ont identifié plus de 400 maladies qui provoquent des déficits immunitaires primaires et des centaines de gènes qui prédisposent aux infections » (page 37).

Sachant qu’un hapolyte est un groupe de gênes contigus sur un chromosome, « l’hapolyte majeur de susceptibilité au covid-19 hérité de Néerdenthal est présent en Asie du sud à une fréquence de 30%, en Europe à 8%, chez les Américains à 4% (…). La fréquence le plus élevée se trouve au Bengladesh, où plus de la moitié de la population (63% porte au moins une copie de l’hapolyte néandertalien à risque » (page 41). Ajoutons que les Africains n’ont pas hérité de ce gêne car le croisement entre sapiens et néandertaliens s’est effectué après la sortie du continent africain.

Trois maladies infectueuses ont largement pesé sur l’histoire humaine, à savoir la peste, la variole et une infection provoquant un ulcère du foie. Notons que l’homme décédé dans les Alpes à la frontière de l’Italie et de l’Autriche, il y a plus de 5 000 ans, souffrait de ce dernier mal ; rappelons qu’il est connu sous le nom d’Ötzi (page 57). L’analyse du génome en question permet de reconstituer des migrations humaines, depuis l’Afrique du Tropique du Capricorne jusqu’en Afrique du nord, en passant par le Proche-Orient, les plaines d’Europe centrale et l’Espagne. Les deux derniers chapitres de cette première partie sont intitulés "La sédentarisation, berceau des grands fléaux" et "Infections, génétique et sélection naturelle".

La seconde partie traite de façon assez exhaustive du rôle des maladies infectieuses dans l’histoire française et mondiale. On voit là que Louis XIV vit sa descendance (fils/fille, petit-fils/petite-fille, arrière-petit-fils/ arrière- petite-fille) largement frappée par la tuberculose, la rougeole, la variole et une pneumopathie. Durant la Guerre de 1870, les Français comptent 23 000 morts de variole alors que les Allemands, déjà en grande partie vaccinés, ont moins de 300 victimes de cette maladie (page 85). Durant les dernières cent années de son existence, l’Empire byzantin connut neuf épidémies successives de peste, ce qui contribua largement à son affaiblissement.

En septembre 1792, c’est plus la dysenterie frappant les troupes du duc de Brunswick que la vaillance des soldats révolutionnaires qui déboucha sur la victoire française à Valmy (page 91). Les armées commandées par le général Bonaparte ou Napoléon Ier connaissent la peste en Palestine et le typhus ainsi que la fièvre des tranchées (avant la lettre) en Russie. Pour ce dernier exemple, l’étude des restes de plus de 1 700 soldats de la Grande Armée, trouvés à Vilnius en Lituanie, à l’orée du XXIe siècle l’a révélé (page 96).

Si on est malheureux d’apprendre que, dans les années 1830, le choléra fit un quart d’un million de victimes dans l’empire des Habsbourg en frappant, comme ailleurs, en particulier les villes, par contre on reste dubitatif sur le fait que cela vint modifier la composition ethnique des cités (baisse de la proportion des germanophones) au point de « (poser) les bases de l’éclatement d’un empire dont l’unité était scellée par la langue de Schubert » (page 98). C’est faire peu des cas du Printemps des peuples de 1848, de la montée générale du nationalisme en Europe et des défaites successives des armées du pays en question durant ses soixante dernières années d’existence. Nous savons, grâce à d’autres lectures,  que le nombre de soldats, des deux camps, frappés par le choléra, le typhus et la dysenterie   lors de la Guerre de Crimée (1853-1856), déboucha sur une première professionnalisation du métier d’infirmière auprès de plusieurs nations engagées dans ce conflit.

On sait combien l’Armée d’Orient souffrit de la malaria autour de Salonique durant la Première Guerre mondiale. D’autres exemples d’épidémies sévissant durant ce même conflit pour diverses armées sont fournis ; dans le cas de la Grippe espagnole, il y eut d’ailleurs plus de civils atteints que de militaires car la maladie dura bien après la fin des hostilités officielles. Un chapitre entier est consacré à la diffusion de la variole aux Amériques, avec une mention inattendue de l’arrivée en 1518 sur Saint-Domingue d’un esclave noir infecté (page 115). On reparle d’ailleurs de cette dernière île au sujet de la fièvre jaune qui frappe les troupes françaises présentes entre 1801 et 1803 pour réprimer l’insurrection de Toussaint Louverture. L’existence d’épidémies à bord de bateaux est illustré par divers faits dont celui du navire qui apporta en 1720 la peste à Marseille puis à une partie de Provence.

La troisième partie de ce livre fait un large tableau des bactéries et virus actifs dans le passé et le présent immédiat. Notons la mise en exergue des diffusions de certaines maladies quand sévit en Amérique du sud, le courant chaud El Niño (pages 204-205). Les conséquences, du point de vue des épidémies, à venir du réchauffement climatique sont esquissées. Le dernier volet de l’ouvrage évoque l’histoire des vaccinations et les recherches de l’Institut Pasteur afin de trouver des moyens capables de lutter contre le propagation du covid. On trouve là, à propos de l’épisode de la chloroquine, une citation de Stephen Hawking : « Le plus grand ennemi de la connaissance n’est pas l’ignorance, mais plutôt l’illusion de la connaissance » (page 256). On apprécie la présence d’une petite quinzaine d’illustrations, sur des thèmes divers.       

coup de coeur !

Pour tous publics Peu d'illustrations

Patricia

Note globale :

Par - 165 avis déposés - lectrice régulière

734 critiques
18/02/21
Vous avez survécu au Covid-19 ? C’est (aussi) grâce à l’homme de Neandertal
https://fr.news.yahoo.com/covid-19-survie-homme-neandertal-133217842.html
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