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La Belle Époque des pilleurs d'églises

La Belle Époque des pilleurs d'églises
Les Ardents 335 pages
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Avis de Ernest : "Le chef des pilleurs d'églises et l'antiquaire étaient franc-maçons et tout ça, ça fait de mauvais Français !"

Nous sommes là en présence d'un ouvrage bien en phase avec un phénomène culturel très significatif des débuts de la IIIe république. En effet les musées municipaux se développent car les républicains voient en eux un instrument du développement d'éducation. Pour ces derniers si la Seconde république est morte sous les coups du bonapartisme c'est parce que les masses d'électeurs étaient globalement peu éduquées.

On voit donc, d'abord parfois dans une salle de la mairie puis dans un local spécifique, fleurir des musées dans toutes les petites villes. Paul Bert, à qui les lois scolaires doivent autant qu'à Jules Ferry, défend (avec d'autres) l'idée des musées cantonaux. Ces musées sont enrichies par des fouilles archéologiques locales (alors faites sans autorisation), des apports de militaires revenant des colonies, des dons de collections diverses par des particuliers et ponctuellement d'achats. Les antiquaires trouvent moins d'objets de valeur à proposer (les œuvres entrées dans un musée n'en resortent pas) alors qu'il y a un élargissement de leur clientèle potentielle. Cet aspect n'est pas trop développé dans l'ouvrage aussi il nous semblait bon de l'évoquer de manière explicite. Par contre l'ouvrage pointe l'arrivée de nouveaux collectionneurs et une partie d'entre eux résident aux USA.

C'est l'époque où se met en place une protection des œuvres d'art (depuis 1887 tout objet classé ne peut être vendu sans l'accord des autorités), le député radical bisontin libre-penseur Charles Beauquier porte un texte de protection des sites pittoresques finalement adopté en 1906 et est voté en 1913 la loi de protection des monuments historiques. Les malfaiteurs trouvent dans leur environnement géographique des trésors dans des locaux dans lesquels il est facile de pénétrer à savoir les églises. Les musées peuvent également être victimes de vols et c'est le cas pour Amiens et Rouen en 1907 ainsi localement à Guéret.

Anthony Thomas est natif de Clermont-Ferrand, c'est un grand séducteur ; il a hérité d'une tonnellerie. Avec l'antiquaire auvergnat Michel Dufay, il parcourt les campagnes du Massif central afin de proposer aux curés de leur acheter des objets d'art religieux (se proposant éventuellement de leur fournir des faux en remplacement). Certains curés en question pensent que leur église va vraisemblablement être dépossédée par le gouvernement radical de leurs trésors, aussi ils se laissent parfois convaincre. Les deux personnes précédemment citées sont très bien introduites au Grand Orient et la presse catholique, et en ces lendemains de loi de séparation de l'Église et de l'État la presse catholique ne va pas manquer d'exploiter cette particularité.

Les auteurs parlent fort à propos du développement du métier d'antiquaire et de l'ambiance anticléricale de ce début de XXe siècle. Tout une série de vols se font à la Belle Époque dans les églises ou musées d'un espace géographique qui correspond aux régions du Limousin et de l'Auvergne telles qu'elles existèrent jusqu'au début du XXIe siècle.

C'est par l'intermédiaire d'un déjà député socialiste et futur maire quasi inamovible de Limoges (en fait il paya de Vichy sa révocation et de son ultra pacifisme une absence de responsabilité à l'hôtel de ville d'une petite dizaine d'années) que l'enquête va progresser. En effet Léon Betoulle introduit en septembre 1907 l'antiquaire parisien Gilbert Romeuf (peut-être indicateur de police à l'occasion), auprès des autorités préfectorales de Limoges. Ce dernier est le beau-frère d'un ami du parlementaire. On suit avec intérêt une enquête policière qui amène à l'arrestation des voleurs mais ne s'intéressent pas vraiment aux receleurs qui prétendent regretter de ne pas avoir été assez curieux sur la provenance des objets qui leur ont été proposées. Le chef de la bande Anthony Thomas, qui avait déjà été condamné pour diverses escroqueries, est envoyé au bagne en Guyane et ne survit guère de temps là-bas. On aurait aimé que les auteurs aient consulté son dossier de bagnard aux archives de l'outre-mer à Aix-en-Provence ; on peut toutefois imaginer que face à de gros durs il dut guère faire le poids et qu'il souffrit autant de ses codétenus, que des conditions de vie et de la dureté des gardiens. On se félicite de l'exceptionnelle taille, quantité et qualité de l'iconographie. Se reporter à http://www.dailymotion.com/video/x5fvyti_la-belle-epoque-des-pilleurs-d-eglise-une-expo-a-la-bfm_tv afin de voir l'exposition que s'est faite à partir de l'ouvrage.

Pour tous publics Beaucoup d'illustrations

Ernest

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