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Les Pays de Savoie en Grande Guerre 1916: Face à la guerre d’usure

Les Pays de Savoie en Grande Guerre 1916: Face à la guerre d’usure
Université Savoie Mont Blanc LLSETI et La Savoisienne 258 pages
1 critique de lecteur

Avis de Octave : "Les Savoyards mettent la main à la pioche"

Par rapport à la façon dont les Savoyards (à l’époque ces derniers se fichaient complètement qu’on les appelle "Savoisiens") au front ou à l’arrière vécurent la Grande Guerre, on disposait déjà en particulier des trois ouvrages de Mino Faïta et du livre Charles Vuillermet (1890-1918) : carnets et dessins d’un officier savoyard dans la Grande Guerre. Il est à remarquer que depuis 2014 se tient chaque année à Chambéry un colloque en rapport avec une année de conflit, donc après un ouvrage avec diverses communications autour de l’année 2014 et 2015, voilà que sort un livre autour de 1916. Notons que l’on trouve dans Les Pays de Savoie en Grande Guerre 1916 : Face à la guerre d’usure, un texte de Mino Faïta évoquant les conditions de vie matérielle des veuves, orphelins, invalides (sans oublier les obusés, victimes de choc psychologique) et prisonniers. 

Cette région est intéressante à plus d’un titre et en particulier au fait qu’elle est en partie frontalière avec un pays neutre et d’autre part par le fait qu’elle est alors le dernier territoire de métropole à être entrée (avec le comté de Nice) dans le sein de la patrie française à peine plus d’un demi-siècle auparavant.

Après une introduction de Frédéric Turpin, on trouve onze communications et une conclusion. Dans l’introduction, on notera que dans les villages proches de la frontière franco-helvétique, les familles ne peuvent recevoir chez elles le permissionnaire ; celui-ci n’a le droit que de s’approcher du centre du département de Haute-Savoie tant on craint qu’il ne déserte. Les communications centrales sont regroupées en trois thèmes : les combattants savoyards, l’effort de guerre et les transformations socioculturelles.

Illustration absente de l'ouvrage

On découvre que l’auteur du récit de la bataille de Verdun qui fait autorité jusqu’à la Seconde Guerre mondiale est né à Thonon-les-Bains, il s’agit d’Henry Bordeaux qui réside à Paris mais passe ces étés en Savoie durant la Belle Époque. Officier dans la territoriale, il passe du service des chemins de fer au bureau de renseignements de l’état-major, il ne combat pas. Il réalise des travaux de commande comme celui de la bataille de Verdun et se fait censurer sur le rôle du général de Castelnau qu’il souligne et disparaît, le but des autorités officielles étant de mettre en avant le général Pétain. Il laisse aussi un  Journal de guerre où il pointe le fait que les généraux français ne se rendent pas sur le front, ce qui fait que l’état-major ignore la fatigue des soldats et se dispensent de venir les féliciter. Il reprend l’idée que les méridionaux font de mauvais soldats. Il n’est pas plus respectueux des hommes politiques. 

Esther Deloche pose la question de la présence au feu des membres du clergé en rappelant qu’un journal comme La Dépêche de Toulouse traite régulièrement ces derniers d’embusqués. En fait ceux qui sont brancardiers chargent avec les autres. On connaît généralement le centre de renseignements de Rechésy près de Belfort (on y trouve en particulier le caricaturiste Hansi), par contre on ignore généralement son équivalent à Annemasse. Les informations recueillies proviennent d’agents en Allemagne et Autriche, dans des pays neutres (Suisse et Hollande) et auprès de rapatriés (les Allemands ont expulsé des civils à certaines occasions).

Un texte montre que la France comptait beaucoup sur la main d’œuvre italienne et était prête à fermer les yeux dans une certaine mesure à la présence d’insoumis outre-alpins et que Paris entend imposer à Rome une aide en matériel militaire contre un envoi de main d’œuvre. Une contribution s’attache à déterminer le taux d’inflation en Savoie durant le conflit ; si le prix du pain n’augmente pas énormément par contre sa qualité se détériore beaucoup entre le début et la fin du conflit et il est fait obligation de vendre du pain de la veille afin d’en limiter la consommation. Les appels à la générosité publique, en particulier sous la forme dite des journées, et l’appel à verser son or ou souscrire des emprunts font l’objet de réflexions.

Les restrictions font d’ailleurs l’objet d’une autre étude où est abordé le fait que les manifestations festives sont interdites, même le 14 juillet ne doit donner lieu à aucun banquet ou feu d’artifice. Il est rappelé que le contenu des programmes scolaires fait une place certaine à la mobilisation patriotique des enfants et que les institutrices du village, tout en gardant leurs élèves, prennent en plus ceux de leurs collègues instituteurs mobilisés. De plus quelques retraités reprennent du service. On peut parler, avant la lettre, de désert médical, vu la mobilisation de tous les médecins qui ont moins d’une cinquantaine d’années.   

On apprend que les catholiques neutralistes en Italie sont de tous les bords, à la fois parmi ceux qui refusent toujours l’existence d’un royaume d’Italie qu’ils perçoivent gouverné par la franc-maçonnerie et la grande bourgeoisie que parmi des catholiques sociaux. Les initiatives du pape Benoît XV et leurs réceptions tant en Italie qu’en France sont rappelées ; comme en France le conflit permet une acceptation, par certains catholiques, d’un régime que l’on n’appréciait pas. Les diverses conséquences du conflit dans le Val d’Aoste, une région où il y a une arrivée tant de population civile que de militaires italiens (il y avait une peur d’invasion de l’Italie du nord en passant par la Suisse) ou ennemis (des prisonniers). Nous avons fait le choix de ne retenir que le contenu de certaines communications de ce livre, d’autres apparaîtront vraisemblablement intéressantes à ses lecteurs. On apprécie les très nombreuses illustrations.          

Pour tous publics Beaucoup d'illustrations

Octave

Note globale :

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