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Le rêve de l’assimilation: De la Grèce antique à nos jours

Le rêve de l’assimilation: De la Grèce antique à nos jours
Passés composés346 pages
1 critique de lecteur

Avis de Adam Craponne : "L’assimilation: un objectif d’ouverture ou un projet de fermeture ?"

Voilà un ouvrage qui permet de voir comment le concept d’assimilation a pu être compris, selon les époques et les pays, de façon différente. L’introduction se donne comme mission de voir les sens qu’a pu prendre ce mot dans tous les domaines (rappelons que l’assimilation est un mot qui s’emploie notamment en médecine) et définir cette idée. Toutefois évidemment ce qui intéresse l’auteur « c’est le sens politique et socioculturel qui s’est consolidé, dans les colonies comme en métropole, et c’est celui qui nous intéresse ici » (page 13). Toujours dans cette partie, il s’agit de distinguer l’assimilation de l’intégration et de l’acculturation. On relève ceci :

« L’intégration suppose seulement de donner une place à autrui dans la société sans lui faire adopter intégralement le mode de vie majoritaire. (…)

«  l’assimilation désigne le processus social qui conduit à l’homogénéisation (linguistique, culturelle, politique) pus ou moins poussée des membres du groupe » (page 14).

« L’acculturation peut être définie comme un phénomène spontané de transformation culturelle, par exemple celle des peuples qui rêvent de l’American way of life sans jamais avoir rencontré d’Américains ».

« l’assimilation doit changer des mœurs, c’est-à-dire des modes de vie concrets. Contrairement à l’intégration qui peut se borner à exiger le respect de valeurs abstraites, l’assimilation s’inscrit dans la vie quotidienne et entend transformer l’individu des pieds à la tête » (page 15).

« L’assimilation ne fonctionne qu’en l’absence de racisme, et le racisme interdit l’assimilation » (page 27).

Il est rappelé que dans quasiment toutes les civilisations, on étiquette certains groupes comme a priori assimilables et d’autres non. Dans l’Antiquité chinoise, on parlait de Barbares du cuit (孰蠻 shuman) en voie d’intégration politique et culturelle, et de Barbares du cru (生蠻 shengman) insoumis.

Les chapitres s’intitulent respectivement : L’hellénisation du Proche-Orient, À Rome fais comme les Romains, Une religion assimilatrice : l’islam des premiers siècles, Les dilemmes de l’Empire français, La France métropolitaine : terre d’assimilation, Dôka : l’exception japonaise, L’américanisation à 100%. La conclusion dresse des perspectives pour l’assimilation en France, soulevant la question de la religion comme frein possible mais non comme obstacle infranchissable.  

On relit avec intérêt la logique coloniale de l’Empire du Soleil levant, celle-ci limite les possibilités d’acculturation quelque soient les espaces. Cependant de grandes différences existent dans l’univers du panasiatique multiethnique selon que l’on soit à Taiwan, en Corée ou en Mandchourie. Nous savons d’ailleurs que le dernier soldat perdu de l’armée impériale était un aborigène de Taiwan ; il ne se rendit  qu’au milieu des années 1970 et avait donc vécu trente ans seul sur l’île de Morotai en Indonésie. C’est d’ailleurs à Formose que la scolarisation en japonais était la plus forte puisqu’elle approchant les trois-quarts pour les enfants du primaire. Si l’identité taiwanaise est largement disticte de celle chinoise continentale, elle le doit en parti à soixante années de colonisation japonaise. Notons que pour deux îles du Japon actuel, à savoir Hokkaidô (la seconde du pays en superficie) et Okiwana (grande de 1 200 km2), les populations indigènes majoritaires connurent un fort mouvement assimilateur.

Il fut un temps, où d’ailleurs dans quelques manifestations les pieds-noirs scandaient  non sans arrogance : « Les Arabes avec nous », où Jean-Marie Le Pen jeune député déclarait : « J’affirme que rien dans la religion musulmane ne s’oppose à faire du croyant ou du pratiquant musulman un citoyen français » (page 171). Jusqu’au milieu des années 1950, les Européens d’Algérie refusaient l’assimilation institutionnelle qui impliquait l’égalité des droits  et des statuts de toutes les communautés ; ils sa firent ensuite les ardents propagandistes du mot espérant qu’une assimilation culturelle renforcée entraînerait  une perte identitaire des Arabes qui permettrait le maintien du pays dans le cadre français. Alors que se discute la loi sur le séparatisme, la lecture de certains pages de cet ouvrage s’avère pertinente.  

Au début de l’ouvrage, on savoure le discours d’Alexandre le grand à ses troupes qui lui reprochaient d’helléniser les Perses, rappelant que son père avait fait de Macédoniens  montagnards ruraux des êtres policés habitant des villes (page 46). On peut faire un lien là avec certains membres d’origine italienne, qui ont vu leurs ancêtres souffrir de discrimination, (allant même jusqu’à une forme de pogrom), aujourd’hui électeurs de l’extrême-droite.

idé cadeau

Pour connaisseurs Aucune illustration

Adam Craponne

Note globale :

Par - 734 avis déposés - lecteur régulier

318 critiques
15/05/21
L'assimilation : un concept de droite ?
https://www.youtube.com/watch?v=q1VrReEyMyM
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