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Héritages connectés: Lieux et milieux de mémoire autour de Notre-Dame de Santa Cruz d’Oran

Héritages connectés: Lieux et milieux de mémoire autour de Notre-Dame de Santa Cruz d’Oran
L’Harmattan251 pages
1 critique de lecteur

Avis de Benjamin : "Foutez-moi une Vierge là-haut, sur la montagne: elle se chargera de jeter le choléra à la mer ! (phrase apocryphe du général Pélissier en 1849)"

Faute de place nous n’avons pu intégrer la fin du titre qui indique que les lieux évoqués sont en France, Espagne et Algérie. Ce titre a reçu le Prix scientifique de cet éditeur et on peut regretter qu’il n’adopte pas une démarche plus vulgarisatrice pour rendre sa lecture plus captivante. On aurait bien aimé par exemple que d’entrée de jeu, on nous explique les origines de l’église Notre-Dame de Santa Cruz d’Oran.

Nous allons donc faire ici ce que nous aurions aimé trouver en début d’ouvrage et non vraiment patiemment (et encore que partiellement) pages 204 à 206. En effet  je ne suis pas sûr que tous les lecteurs aillent jusque là, pronostiquant un nombre potentiel d’abandon de l’ouvrage. Il s’agit de comprendre en quoi ce pèlerinage s’ancre dans une mémoire longue. Le fort de Santa-Cruz est un ouvrage construit par les Espagnols entre 1577 et 1604, à l’initiative du gouverneur de la ville, à savoir le marquis de Santa-Cruz. En effet Oran est occupée par les Espagnols dès 1505, époque où Jeanne Ière dite la Folle, fille de Ferdinand d’Aragon et d’Isabelle de Castille est la reine. Les Espagnols restent dans cette cité d’Afrique du nord jusqu’en 1791, avec toutefois une interruption entre 1708 et 1730. Le 4 janvier 1831, les Français entrent dans la ville et y demeurent pour plus de 130 ans. Les vagues d’émigration espagnole sont continues, la grande dernière étant celle des républicains espagnols.

La chapelle de Santa Cruz est en léger contrebas du fort de Santa-Cruz, d’après Marina Calvo Pérez une première chapelle de Notre-Dame de Santa-Cruz est érigée en 1850 après qu’une procession ait célébré la fin d’une des épidémies de choléra. Cette dernière prend fin après qu'une procession religieuse n'ait été suivie d'une pluie diluvienne qui balaie les bactéries du choléra.

Ce bâtiment religieux est la première église construite en Algérie. Souvenons-nous que si le culte catholique est célébré à Alger dès l’année de l’arrivée des troupes françaises c’est que la mosquée de Ketchaoua à Alger est transformée en cathédrale Saint-Philippe. L'ancienne chapelle est démolie en 1951 et la basilique qui prend sa place est inaugurée le 8 novembre 1959. Restée attribuée au culte chrétien, cette église a vu terminer ses travaux de restauration en 2018.

Notons personnellement que le médecin militaire Pierre Vignes (retraité à Bordeaux), à la pointe du combat contre le choléra à Oran dès 1834, signale notamment qu’un très grand nombre de soldats sont alors atteints et que cette maladie est apparue dans le quartier humide en bord de mer. Certes cet ouvrage ne relève par de l’écriture d’une historienne, mais pour nous cette impasse sur certains aspects de contextualisation est une lacune surtout pour un ouvrage  qui compte 251 pages.

L’objectif de ce livre est de représenter en quoi les pèlerinages autour de statues de la Vierge ramenées d’Algérie en Espagne ou en France sont des lieux de mémoire des familles pieds-noires de racines hispaniques. Pour la péninsule ibérique sont largement évoquées les villes de Dalias et d’Alicante. Almeria et Aquadulce possèdent également des statues de la mère de Jésus, sans que cela ne donne lieu à des pèlerinages organisés collectivement. Une carte page 182 recense les lieux de pèlerinages en rapport avec ces Madones d'Oranie, dans les trois pays en question.

Un sanctuaire Notre-Dame de Santa Cruz  a été inauguré à Nîmes en 1969 dans le quartier du Mas-de-Mingue où les HLM avaient permis d’accueillir nombre de rapatriés d’Algérie. Selon Baussant à la page 17 de son ouvrage Pieds-noirs. Mémoires d’exils, 60% des rapatriés arrivés au Mas de Mingue étaient d'origine espagnole. 

La statue de la Vierge Notre-Dame du Salut de la basilique oranaise était rentrée dans l’hexagone en 1965 et ce lieu religieux l’accueilli. Pour le jeudi de l’Ascension, les premiers pèlerinages commencent, selon l'associations, dès 1963. Après la création du sanctuaire, ils rassemblent pour ce même jour 150 000 personnes et aujourd'hui on compte 2 000 fidèles. Le Sanctuaire est ouvert tous les jours sauf le dimanche après-midi, une messe y est dite chaque dimanche et jour de fête. La Vierge du sanctuaire de Nîmes voyage, ainsi le bulletin de l'association des Amis de Notre-Dame de Santa-Cruz, nous apprend qu'elle se rendra le 03/03/ 2024 à Alicante et le 07/07/2024 à Parisot (dans le Tarn).

Terminons par deux informations au contenu bien différent, mais liées par le phénomène migratoire. À ce jour, les habitants de ce quartier à l’est de la ville de Nîmes sont très majoritairement maghrébins. On a pu estimer que ce fut jusqu'à 100 000 pieds-noirs (mais certains pensent à plutôt autour de 50 000 qui semmble être le chiffre minimum) qui ont rejoint l'Espagne, tous n'ayant pas d'ailleurs des racines hispaniques.  

Pour connaisseurs Beaucoup d'illustrations

Benjamin

Note globale :

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