Avis de Octave : "Infirmière pendant la Première guerre mondiale"
C’est sûrement que nous approchons un milieu dans son époque, ici celui d’une famille bourgeoise où le père est médecin dans un hôpital parisien qui subit les conséquences de la Grande Guerre. Le père soigne bien vite les blessés de guerre qui arrivent à l’Hôtel-Dieu où il travaille. Si le dernier de ses frères reste à ses côtés, vu son jeune âge, Geneviève voit son frère aîné André devenir officier dans l’infanterie et son frère cadet employé comme brancardier. Ceci nous permet d’avoir des nouvelles des combats, ainsi les tranchées et les tirailleurs sénégalais sont vus à travers le courrier d’André.Le nombre impressionnant de morts français est très bien senti à travers l’hécatombe qui frappe la quasi-totalité des jeunes hommes, de sa famille ou non, qui sont partis se battre, le dernier étant André qui meurt en 1919 des suites de son gazage lors des combats à Saint-Quentin.
De nombreux extraits de textes de généraux sont intégrés au récit : le message de Joffre aux Alsaciens libérés au début août 1914, la lettre de Gallieni (alors gouverneur militaire de la capitale) qui fut rédigée le même été au lycée de jeunes filles Duruy annonçant qu’il défendra Paris, le discours de Gallieni de fin décembre 1914 sur les mauvais citoyens qui demandent la paix …
Des évènements de la vie quotidienne à l’arrière sont portés à la connaissance du lecteur. Le casino et le Grand Hôtel d’Houlgate en Normandie (où la famille a une résidence secondaire) sont transformés en hôpitaux tandis que la capitale est menacée par des bombardements. Houlgate est une ville côtière du Calvados, voisine de Cabourg (précisions de notre ressort) ; il est dommage que n’apparaisse pas de façon explicite dès le départ cette dimension normande pour un lectorat qui n’ira pas consulter un document pour s’en assurer. Ceci d’autant qu’apparaissent des faits qui montrent par exemple que Germaine sœur de lait de Geneviève va se faire embaucher à l’usine de munitions de Dives (sans préciser d’ailleurs “sur-Mer“). À travers l’action caritative de Geneviève en faveur des soldats puis sa décision de suivre une formation d’infirmière, percent un nouveau rapport des femmes avec l’ensemble de la société.
Les évènements internationaux sont pointés comme l’abdication du tzar en mars 1917. Au niveau des informations fournies, on peut regretter que la narratrice semble indiquer que certains Français ont compris que dès le 21 juillet l’affaire de Sarajevo allait déboucher sur un conflit entre l’Allemagne et l’Autriche : « j’ai entendu papa dire que si les Allemands voulaient détruire la civilisation française, on la défendrait ! ». Rappelons tout de même que l’ultimatum autrichien à la Serbie date du 23 juillet 1914 et que ce n’est que dans les jours qui suivent avec la mobilisation des armées russes les 29 et 30 juillet 1914 que la marche vers la guerre apparaît possible (mais non certaine) à des Français déjà bien informés.
Il est nécessaire de simplifier mais il est dommage que soit délivré le message que la guerre déclarée par l’Allemagne le 1er août à la Russie et le 3 août à la France était inéluctable depuis l’attentat de Sarajevo (du 28 juin 1914).
Toutefois en dépit de quelques points discutables, l’atmosphère qui baigne les esprits durant cette période est très bien vulgarisée en direction des lectrices potentielles âgées de dix à quatorze ans. On pourra compléter cette lecture par celle du Journal d’Adèle où l’action se déroule en Bourgogne, l’ouvrage déjà présenté sur ce site est publié chez le même éditeur.
http://www.sciencesetavenir.fr/archeo-paleo/patrimoine/1914-1918-exposition-au-memorial-de-verdun-sur-l-evolution-de-la-medecine-de-guerre_107376