Avis de Zaynab : "Des royalistes méridionaux courageux, mais pas téméraires, attendent la défaite de Waterloo pour massacrer leurs ennemis"
La Terreur blanche de 1815 semble un phénomène propre au quart sud de la France et plus particulièrement aux départements riverains du cours inférieur du Rhône quoique l’Hérault soit bien touché aussi. L’activisme royaliste, sous la Révolution, avait d’ailleurs démarré dans une région à cheval sur le Gard et l’Ardèche au Camp de Jalès, en fait avec la Conspiration du comte de Saillans. Aurélien Lignereux avance, dans son ouvrage Chouans et Vendéens contre l’Empire : 1815 L’autre guerre des Cent-Jours, que l’Ouest n’a pas connu de Terreur blanche en 1815.
On trouve en entrée deux cartes géographiques lisibles, l’une porte sur le nombre de morts violentes dues à la Terreur blanche et l’autre traite des déplacements de l’armée royale (commandée par le duc d’Angoulême) de fin mars à début avril dans la vallée du Rhône (de Valence à Pont-Saint-Esprit). Rappelons que la bataille de Waterloo se déroule le 18 juin 1815, alors que Napoléon débarque le 1er mars à Vallauris (le bivouac est installé au Golfe-Juan).
Avec trois montagnes à proximité, le Sud-est et le Sud-Ouest permettent aux réfractaires à la conscription de se cacher aisément. L’auteur rappelle que durant l’année 1813 le bourbonisme, dans ces deux régions, s’exprime de façon manifeste sous forme de cris, affiches et écrits. Les troupes anglaises, espagnoles et portugaises avaient franchi la frontière franco-espagnole en octobre 1813, avec dans leurs bagages le duc d’Angoulême (fils aîné de Charles X, né en 1775) qui d’ailleurs retrouve ultérieurement dans le Médoc Louis de La Rochejaquelein (né en 1777, il est le frère cadet de deux généraux vendéens et époux de la veuve de Lescure). Ainsi durant plus de six mois, le Pays basque français fut à l’heure royaliste (même si Bayonne résiste) alors que le reste de la France restait dans l’univers impérialiste.
Les circonstances font qu’en mars 1815, le duc d’Angoulême est en voyage officiel à Bordeaux aussi il lève dans le Midi une petite armée de volontaires appelés "miquelets" (ce qui rappelle le nom des troupes de mercenaires embrigadées en Espagne par Miquelot de Prats lors d’une révolte catalane en 1640). Sont réunis 5 000 hommes sous le commandement du prince, ceux-ci se dirigent vers la vallée du Rhône dans l’espoir de bloquer à Napoléon la route vers Paris. Toutefois désertions et résistance locale de patriotes amènent la débandade de cette troupe et au carrefour de l’Ardèche, du Gard et du Vaucluse à La Palud (aujourd’hui Lapalud, dans le dernier département cité), le duc d’Angoulême le 8 avril 1815 signe une capitulation qui lui permet de partir en Espagne.
Durant les Cent-Jours se mène dans tout le Midi une débauche d’initiatives venant des deux camps (républicain et bonapartiste réunis face au royaliste) afin de mobiliser les populations derrière soi. Une centaine de pages couvre les évènements qui précèdent l’annonce de la défaite de Napoléon en Belgique.
La seconde partie va nous évoquer comment les royalistes vont reprendre le contrôle de toute la région. Dans la région de Nîmes, on retrouve le capitaine Achard, agitateur royaliste de 1790 à 1792 qui, le jour où on apprend dans le Languedoc l’issue de la bataille de Waterloo, avec une cinquantaine de pécheurs armés par ses soins, s’empare de la ville d’Aigues-Mortes. Cette deuxième partie évoque des cas précis de massacre, et en particulier l’action du paysan Jacques Dupont dit Trestaillons (ancien miquelet), dans les environs de Nîmes,à l’encontre de protestants réputés a priori hostiles au retour de la monarchie. Celui-ci déclarait : « Il nous faut un roi terrible à qui soient inconnus les mots de bonté, de clémence et de pardon. Faisons-nous justice puisqu'on ne nous la fait pas. Servons le roi malgré lui ! ».
Les frères Faucher (image absente de l'ouvrage)
Le maréchal Brune, qui avait signé un armistice dans le Var avec le vicomte de Bruges début juillet 1815, est assassiné le 2 août 1815 en Avignon dans une auberge. L’ouvrage est beaucoup plus une réflexion sur les causes et les faits, ainsi que sur l’entretien de cette mémoire (objet de la troisième partie), qu’un récit détaillé des évènements qui jalonnèrent la Terreur blanche dans sa partie spontanée. En effet succéda une seconde phase qui se caractérise par une épuration légale qui marque sa volonté de revanche sur la Révolution et l’Empire. Elle touche plus du quart des fonctionnaires, aboutit à la condamnation de plusieurs généraux de l’empire ralliés à Napoléon durant les Cent-Jours et condamne à l’exil les régicides. L'auteur signale que la dernière commémoration d'un évènement en rapport avec cette période de la première phase de la Terreur blanche a eu lieu à La Réole (dans le département de la Gironde) en 1960, pour le bicentenaire de la naissance des frères Faucher.
En prolongement de cette lecture, on se plongera dans certains ouvrages cités (et d'autres) qui analyseront l'évolution de la situation économique dans le Languedoc et la Provence sous la Révolution et l'Empire. Par ailleurs des études du mouvement royaliste sous la IIIe République dans le Gard et la partie occidentale de la Provence, serait à lire ; rappelons à ce propos l'élection d'un député royaliste dans le Gard jusque dans le milieu des années 1930. Il s'agit de François de Ramel qui siège parmi les indépendants et a quasiment succédé à son père (il y a eu une interruption entre 1914 et 1919) ; notons qu'aucun des deux ne se réclame de l'Action française.
Pour connaisseurs Aucune illustration