Avis de Xirong : "Pétain traître à la patrie dès juin 1940, ceci n’étonnera pas beaucoup"
Jean-Pierre Pécau vient de clore une sous-série chez Delcourt dans la série uchronique "Jour J", en effet dans les volumes 14 "Oméga", 18 "Opération Charlemagne" et 21 " Le crépuscule des damnés" ce scénariste avait revisité la Seconde guerre mondiale à la lumière d’une prise du pouvoir en février 1934 en France par les ligues d’extrême-droite. L’uchronie est à la mode en BD et il semble bien souvent qu’elle autorise à mettre en scène, non pas des faits uchroniques, mais des visions abracadabrantesques. Rappelons que l’uchronie c’est la réécriture du passé en tenant compte de la modification d’une donnée, les autres bouleversements que le changement entraîne sont des conséquences d’une modification originelle. Faire par exemple de Laval un foudre de guerre, lui qui dans sa vie politique n’eut qu’une seule constance le pacifisme, relève du farfelu et de l’inculture historique. Jean-Pierre Pécau nous semble avoir fait chez Delcourt dans le saugrenu autour de la Seconde Guerre mondiale.
Il semblerait qu’il en est pris conscience, que pour Soleil il se soit un peu mieux documenté ou qu’il est pris le temps de digérer ce qu’il avait lu à droite et à gauche précédemment. Toutefois le château de Cangé n’est pas sur la commune de Tours, comme il est dit à la page 34, mais dans celle voisine de Saint-Avertin même si l’essentiel est bien que deux conseils des ministres s'y déroulèrent les 12 et 13 juin 1940 (on regrette d’ailleurs que le récit se caractérise par une absence quasi générale de dates, si ce n’est au départ "juin 1940") et toujours à la même page la ligne de progression des armées allemandes et italiennes ne correspond évidemment pas aux limites de la zone occupée, sauf à imaginer que les soldats du IIIe Reich sont en combattant arrivés à Biarritz et que les Italiens aient percé au-delà de Nice, Gap, Chambéry et Annecy (ce qui est peut-être envisageable en posant que la France en 1940 a le réseau autoroutier de l’an 2000). Autre petite perle, faire appel au groupe parlementaire majoritaire au parlement en présentant Léon Blum ; en effet si en ce début 1940 les socialistes à la chambre de député ont un groupe quasiment égal à celui des radicaux au Sénat (qui siègent à la Gauche démocratique), le fait que les sénateurs socialistes ne soient alors que 15 pour plus de 110 députés valoisiens fait que le groupe majoritaire au Parlement (Sénat et Assemblée nationale réunies) est celui des radicaux.
Les personnages historiques sont ici présentés dans des actions allant avec la logique de leur caractère. Certes est téméraire de prêter une influence capitale à la maîtresse de Paul Reynaud dans la résignation envisageable de ce dernier à demander l’armistice puisque Paul Reynaud démissionne parce qu’il se trouve minoritaire dans son gouvernement sur la perspective de replier les forces françaises en Afrique du nord. Décider de la faire mourir début au lieu de fin juin 1940, est le point de rupture avec l’histoire choisi. Débarassé de l’influence de celle que de Gaulle traitait de "dinde", Paul Reynaud en s’appuyant sur Mandel et de Gaulle fait arrêter Pétain pour haute trahison après avoir congédié Weygand qui refusait l’idée de faire capituler l’armée française.
Pour nous faire suivre cette Seconde Guerre mondiale, Jean-Pierre Pécau a choisi de nous mettre dans les pas de trois amis pilotes Marianne et Yvon (les deux formant un couple) plus Jules. Marianne est une franco-américaine qui a une salle de cinéma et son propre avion (grâce à la mansuétude de son père), Yvon est militaire et fils d'un officier supérieur de la Royale, Jules est dans l'armée de l'air et a abattu plusieurs avions allemands.
Le serbe Jovan Ukropina livre là un graphisme très élégant tant dans les personnages, intérieurs qu’extérieurs. Il nous fait découvrir vue d’avion ou depuis le sol des paysages urbains ou ruraux parisiens, tourangeaux, berrichons et du sud-ouest.
Pour tous publics Beaucoup d'illustrations
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