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Main basse sur l’école publique

Main basse sur l’école publique
Demopolis 223 pages
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Avis de Benjamin : "Pour chaque fin, il y a toujours un nouveau départ (Antoine De Saint-Exupéry)"

Muriel Fitoussi, née en 1977, était alors une journaliste indépendante spécialisée dans les sujets de politique et de société. Elle était déjà l’auteur de nombreuses enquêtes pour différents titres de la presse généraliste et d’investigation. Eddy Khaldi était enseignant en lycée technologique, militant associatif et syndicaliste à l’UNSA éducation (dans sa composante du syndicat des enseignants). Dans les années 2020, il est  président de la fédération des Délégués Départementaux de l'Éducation Nationale (DDEN).

En quatre parties, cet ouvrage tend à mesurer comment sous les mandats de Giscard d’Estaing, Nicolas Sarkozy, Jacques Chirac et François Mitterrand, la laïcité a été bousculée au sein de la République, mais aussi cherche à démontrer que des associations catholiques et libérales entendaient livrer une concurrence sans merci à l’enseignement public.

Dans la première partie, intitulée "Un gouvernement sous influences", les auteurs rappellent que Nicolas Sarkozy fut le premier président à invoquer le nom de Dieu en visite officielle. Ceci fut fait le 20 décembre 2007 à Rome. Il avance alors le concept de laïcité positive. Resteront en mémoire ces propos : « La laïcité n’a pas le pouvoir de couper la France de ses racines chrétiennes. Elle a tenté de le faire. Elle n’aurait pas dû » et « Dans la transmission des valeurs et dans l’apprentissage de la différence entre le bien et le mal, l’instituteur ne pourra jamais remplacer le curé parce qu’il lui manquera toujours la radicalité du sacrifice de sa vie » (page 8). En de nombreuses autres occasions, il donnera de prétendues convictions personnelles religieuses en s’exprimant comme président de la République. Sous son quinquennat la disparition de la carte scolaire et le chèque-éducation sont évoqués.   

Son ministre de l’Éducation nationale, Xavier Darcos, procède à des nominations très politiques de recteurs, dont Maurice Quénet créateur de l’association Créateurs d’école. Cette dernière mêle des idées de retour aux valeurs en cours dans les lycées avant 1968 et des conceptions libérales notamment d’autonomie financière pour les établissements scolaires, de recrutement à profil, recrutement à durée déterminées et rémunérations différenciées. L’ALEPS  (Association pour la Liberté Économique et le Progrès Social) est une association libérale française, fondée en 1966) prône en 2007, lors de la campagne présidentielle qui voit la victoire de Nicolas Sarkozy « la liberté de création et d’extension des établissements (publics ou privés), liberté de leur gestion y compris des conditions pédagogiques et financières de l’admission, liberté d’inscription pour les familles qui satisfont à ces conditions » (page 29).

Xavier Darcos, sous l’impulsion du président, supprime les IUFM accusés de pédagogisme et publie de nouveaux programmes centrés sur le retour aux fondamentaux, les mécanismes et le par cœur, une histoire basée sur les grandes dates sans éclairage contextuel, sans compter le principe des évaluations systématiques. En 2008 la loi, dite de lutte contre les discriminations, autorise l’organisation de l’enseignement par sexe. 

L’enseignement catholique perd peu à peu son caractère proprement religieux, certains évêques s’en inquiètent. En fait la principale caractéristique de ces écoles est la sélection sociale, la catéchèse n’est qu’une petite parenthèse même pas obligatoire (car pouvant être remplacée par un enseignement interculturel sur les religions). Dans un article pour Le Quotidien de Paris en 1992, Paul Malarte venant alors de quitter le Secrétariat général de l’enseignement catholique remarque que les chefs d’établissement de ce secteur privé ne font plus référence catholique ou font une mention discrète à celui-ci dans leur projet.

Derrière Olivier Giscard d’Estaing (frère du président) et Nicole Fontaine (secrétaire générale adjointe, puis  député européenne et ministre) font un effort pour promouvoir une conception libérale de l’enseignement catholique.  Eddy Khaldi et Muriel Fitoussi reviennent sur les caractéristiques de la loi Guermeur  offrant aux enseignants du privé les mêmes avantages salariaux que ceux du public et confirme la liberté des chefs d'établissement à choisir leurs équipes. Il passe ensuite à l’échec de la constitution d’un grand service public unifié, laïque de l’Éducation nationale (SUPELEN).

René Monory, ministre dans le cabinet Balladur, entend faciliter le financement des écoles privées par les collectivités locales et autorise les aumôneries dans les établissements scolaires sans internat. Le ministre de l’Éducation nationale Jack Lang signe en 1992 les accords dits Lang-Coupet pour la formation initiale des enseignants du second degré des établissements privés associés à l'État. Son successeur Bayrou entend remettre en cause la loi Falloux mais le Conseil constitutionnel s’y oppose.  

Luc Ferry prépare en 2004, le texte de la loi du 13 août 2004 porté par son successeur François Fillon. Cette dernière oblige les communes à financer la scolarisation d’un élève scolarisé dans une autre commune. Notons, qu’à côté des collectivités locales de gauche, l’Association des maires des grandes villes de France et Jean-Louis Debré alors président de l’Assemblée nationale. Rappelons personnellement que le père de ce dernier Michel Debré, alors Premier ministre, avait déclaré au sujet de la loi qui allait porter son nom : « Mais, je vous le dis, il n’est pas concevable, il n’est pas concevable, pour l’avenir de la nation, qu’à côté de l’édifice public de l’éducation nationale, l’État participe à l’élaboration d’un autre édifice qui lui serait en quelque sorte concurrent et qui marquerait, pour faire face à une responsabilité fondamentale, la division absolue de l’enseignement en France ».

D’autres informations apparaissent en fin d’ouvrage, en particulier sur les actions de SOS éducation, une association française intervenant dans le domaine de l'éducation, créée en 2001, à l'origine particulièrement d'une campagne auprès des directeurs d'école, enseignants et parents visant à dénoncer l'exposition Zizi sexuel présenté à la Cité des sciences et de l'industrie. Nous savons que certains milieux catholiques s’opposent au principe et à défaut contenu des cours d’éducation sexuelle à l’école.  

 

Pour connaisseurs Aucune illustration

Benjamin

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542 critiques
16/12/24
Le passif du passé à l’Education nationale de François Bayrou https://cafepedagogique.net/2024/12/16/le-passif-du-passe-a-leducation-nationale-de-francois-bayrou/
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