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Jaurès 1859-1914

Jaurès 1859-1914
Autrement283 pages
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Avis de Octave : "Jean Jaurès, auteur de l’Armée nouvelle, mort pour la paix"

Vincent Duclert a tâché de ne pas refaire une nouvelle biographie classique de Jaurès et nous l’en remercions. L’ouvrage est sous-titré « la politique et la légende », et c’est bien l’image que se faisait de lui et de son action ses contemporains et les générations suivantes qui est questionnée.

Si je n’avais pas cité au moins une imprécision relevée, il me semblerait avoir failli à ma tâche. Donc, page 122, il est dit que le guesdiste Alexandre Zévaès écrivit en 1951 une biographie de Jaurès. Quelques remarques à ce propos, guesdiste Zévaès ne l’est plus au moins depuis qu’il a refusé d’entrer à la SFIO (en 1905), d’abord pour le socialisme indépendant (ce qui lui vaut de se voir opposé le guesdiste Brizon aux élections législatives de 1906), puis pour le socialisme national (aux côtés d’Hervé dès les années 1920). Le fait qu’il soit beau-frère de Dufrenne, un inspecteur de l’enseignement primaire (d’une circonscription de l’Oise), leader syndicaliste chez les instituteurs à la Belle Epoque ( à un moment où les syndicats de fonctionnaires sont interdits), et que Dufrenne soit devenu très proche des idées de l’Action française dans l’entre-deux-guerres, fait d’ailleurs écrire avec humour à Alexandre Boisserie (l'un des premiers adhérents de la SFIO en Dordogne) dans un courrier des Années folles qu’il adresse à Emile Guillaumin, qu’avec Dufrenne et Zévaès, on a affaire à une famille de renégats.

Certes, on ne peut reprocher à Vincent Duclert d’avoir omis le contenu de notre beau morceau d’érudition, d’autant que le Dictionnaire biographique du monde ouvrier ignore tout ce que nous avons écrit sur les relations familiales de Zévaès. Toutefois, il est regrettable que n’ait pas été signalé que Zévaès est le défenseur de Villain, l’assassin de Jaurès. Notons toutefois que page 118, notre auteur avance qu’en 1941 un livre de Zévaès fait de Jaurès l’apôtre du rapprochement allemand dans une optique de collaboration avec les nazis. Certains d’entre nous n’ignorent pas que Zévaès fut par ailleurs l’avocat des députés communistes en mars 1940.

Au-delà de cette unanimité à son égard, on peut dire que depuis les années trente, quasiment tous les courants de pensée en France se sont réclamés de Jaurès sur certains aspects de ses opinions. Le candidat FN dans le sud-ouest pour les dernières élections européennes, Louis Aliot, a fait placarder un portrait de Jean Jaurès, portant l’inscription « Jaurès aurait voté Front National ». Le prophète des négationnistes français Paul Rassinier était dans les années trente le principal responsable des Amis de Jaurès pour le Territoire de Belfort (document trouvé dans les archives du-dit département), et il continua à se réclamer de lui.

Nicolas Sarkozy à la présidentielle de 2007 déclare :

« En vérité, la gauche a renié la République de Jaurès ».

Il était donc sérieusement temps que le message de Jaurès soit rappelé : solidarité, vérité, justice. Alors que le centenaire de la déclaration de la Grande Guerre arrive, le chapitre intitulé « Le socialisme et la guerre » permettra aux lecteurs de comprendre que lutte contre la guerre n’excluait pas défense de la République française. Par ailleurs, dans le débat sur la moralisation de la vie publique d’aujourd’hui, on peut s’inspirer de la figure de Jaurès.

« Jaurès a représenté une pratique de la politique qui, par sa critique des pouvoirs, son exigence de la raison, sa conscience de l’injustice et son souci de la pédagogie a développé d’indéniables vertus morales ». (page 251)

Octave

Note globale :

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