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Notes d’une voyageuse en Turquie

Notes d’une voyageuse en Turquie
Turquoise253 pages
1 critique de lecteur

Avis de Octave : "Le Grand Turc et les femmes ottomanes se rebellent mais pas pour le même objet"

Marcelle Tinayre est née à Tulle en 1870, elle est la fille de François Chasteau un dessinateur d’art  et de Marguerite Saigne une institutrice. Elle devient parisienne à l’âge de trois ans. Son attachement pour sa ville natale la fait revenir à Tulle en 1903. Marcelle Tinayre livre d’ailleurs, pour le numéro de Noël 1942 de la revue Notre province, une étude sur les vieux quartiers de Tulle.  Dans son roman La vie amoureuse de François Barbazangues, elle évoque largement la préfecture de la Corrèze.

Elle écrit son premier ouvrage Avant l'amour à l'âge de 19 ans ; elle est connue également pour ses ouvrages La Maison du péché et La rebelle. Elle est une fondatrice du prix Femina. L’ouvrage qui nous intéresse, paru en 1909,  est sous-titré Jours de bataille et de révolution ; choses et gens de province ; premiers jours d’un nouveau règne ; la vie au harem. Ce livre est dédié au journaliste Paul Belon qui l’a aidée dans son séjour.  

Marcelle Tinayre

Ce récit nous emmène dans l’Empire ottoman à un moment où les jeunes-turcs tentent de consolider le pouvoir qu’ils ont pris en juillet, le sultan Abdülhamid II capitule et annonce la restauration de la Constitution. Mais en avril 1909, il tente de s’appuyer sur les islamistes et une partie de l’armée pour reprendre le pouvoir ; il échoue et est alors interné puis remplacé par son frère Mehmed V  qui ne garde plus que des fonctions représentatives.

Alain Quella-Villéger, qui a beaucoup commenté l’œuvre du turcophile Pierre Loti, assure la préface de cet ouvrage. Il développe l’idée que la condition de la femme turque est l’objet d’un large débat à cette époque, les questions suscitées intéressent un certain nombre de féministes européennes (la poétesse et auteure de littérature de jeunesse Lucie Delarue-Mardrus ainsi que Hortense-Marie Héliard qui signe Marc Hélys) et des hommes comme Pierre Loti.

Marcelle Tinayre, lors de son voyage, va rencontrer plusieurs femmes turques dans des endroits divers de la partie européenne (très conséquente jusqu’en 1912) ou de la partie asiatique de l’Empire ottoman. Elle peut ainsi discuter avec Mélek hanoun sur la côte anatolienne,  Selma hanoun (sœur du président de l’Assemblée nationale)  à Scutari (aujourd’hui un quartier d’Istanbul), la romancière francophone Fatma Alié et sa sœur Emié Semié à Gueuz-Tépé (Göztepe) qui est un faubourg de Smyrne, l’écrivaine arménienne Zabel Essaïan. Marcelle Tinayre s’arrête également dans des villes comme Andrinople (Edirne) où elle ne se lie en particulier avec aucune femme ottomane.   

Le journal court de la mi-avril au mois à la fin juin 1909. Des passages sont particulièrement intéressants comme celui au début des pages 100 sur l’enseignement des jeunes filles qui en est à ses prémices. On perçoit également le poids important que les chrétiens représentent encore dans la population et les perspectives d’emploi quasi réservé qui leur sont offertes, ainsi toutes les infirmières rencontrées sont chrétiennes car une musulmane ne peut décemment aller dans un établissement où elle rencontrerait si souvent des hommes en l’absence d’un membre de sa famille.

La question du bonheur des femmes européennes qui épousent des Turcs occidentalisés (au moins en surface) est évoquée ; elle note que des Turcs rencontrés à Paris n'avaient pas les mêmes comportements que ceux qu'ils ont dans leur pays. Globalement les femmes turques, réellement fréquentées par l'auteure lors de son voyage, constituent un public très particulier et ces dernières pensent souvent que leurs enfants vivront dans une société qui aura largement évolué car elles attendent une modernisation du pays dans de nombreux domaines. Des aspects de ce changement sociétal sont exprimés dans le roman Ankara de Yakup Kadri Karaosmanoglu.

Pour tous publics Peu d'illustrations

Octave

Note globale :

Par - 461 avis déposés - lecteur régulier

734 critiques
17/02/20
Vendredi 20 mars à 18h30 : Apéro-Culture « Une Française à Salonique : Marcelle Tinayre, féministe et écrivaine (1914-1918) » par Alain Quellac-Villeger – Historial de Péronne
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