Avis de Zaynab : "La France justicière, la France guerrière, la France conquérante est encore la douce France (La douce France de René Bazin)"
Sous la IIIe République, le manuel de lecture pour les cours moyens ou les cours supérieurs est assez souvent un ouvrage conçu sur le modèle du Tour de la France par deux enfants de G.Bruno ; de cet ouvrage, il existe d’ailleurs deux versions, celle d’avant 1905 où les héros entrent dans les cathédrales et rencontrent à l’occasion la statue d’un saint sur une place et celle d’après 1905 où ces distractions leur sont interdites. Pour ce genre, avec une empreinte marquée par le catholicisme, le chef-d’œuvre, publié en 1935, est Jacobi au pays de France, récemment réédité par ESR et Scholae. Ce dernier éditeur propose également, cette fois de de René Bazin, le manuel de lecture Il était quatre petits enfants, qui couvre environ 100 pages, pour décrire la vie d’une famille paysanne dans un lieu indéterminé au nord de la Loire. L’ouvrage est paru en 1923.
Une dizaine d’années plus tôt, paraît sous la plume toujours de René Bazin, le manuel de lecture La Douce France. Sont proposés cinquante texte d’environ six pages chacun, indépendants les uns des autres, pour ce qui est devenu un précieux document aujourd’hui. Les illustrations sont de J.M. Breton.
Il a été composé avec l’aide de Mademoiselle Ménétrier, qui est d’origine champenoise car née dans le département de l'Aube. Elle est professeur professeur d’École normale au Mans de 1886 à 1891. Sa carrière l’amena à diriger pendant environ une dizaine d’années l’École primaire supérieure de filles (l’équivalent du collège d’aujourd’hui préparant au brevet élémentaire, à ne pas confondre avec le collège d’alors qui prépare au baccalauréat) de Fontenay-le-Comte en Vendée, ceci à partir de 1892. En conflit avec certains parents et des élus, du fait de son militantisme catholique, elle quitte l’enseignement public en 1902 et on la retrouve inspectrice de l’enseignement diocésain dans le département de la Seine.
Dans l’avant-propos, on note :
« Un de mes lecteurs m’a dit :
"C’est le catéchisme de la France que vous faites !"
Ah ! Que je voudrais l’avoir fait ! que je voudrais avoir glorifié toute l’âme de la France ! J’ai seulement essayé de vous dire :
" Aimez-la bien, servez-la bien. mais souvenez-vous que je n’ai pu tout dire, et que nous aurons toujours plus de raisons qu’un livre n’en peut tenir, d’aimer une patrie comme la nôtre". »
Les trois premiers chapitres vantent les avantages géographiques et culturels que possèdent, aux yeux de l’auteur, la France. Le quatrième chapitre amène le jeune lecteur chez un maréchal-ferrant puis auprès des ouvriers des ardoises de Trélazé (alors village proche d’Angers) et enfin chez un pépiniériste. Nous sommes ensuite transportés dans la capitale au musée de Cluny, et comme souvent le récit se clôt par une réflexion à dimension spirituelle (dans tous les sens du terme). En fin de compte, nous est proposé là un vaste tableau de gens modestes d’une France catholique rurale et citadine pour la Belle Époque. On a tout un univers de métiers, outre ceux déjà cités, on relève (traité dans un chapitre en particulier à chaque fois) celui de meunier, berger, boucher, pêcheur d’eau douce, tisserand, rempailleur de chaise, ramoneur, dentellière…
Cliché absent de l'ouvrage, montrant un ouvrier de l'ardoise (équivalent d'un dessin présent dans le livre)
Parfois, on a une focalisation sur certains personnages comme Jeanne d’Arc lors de sa prise de décision de quitter la Lorraine (au onzième chapitre), le peintre Jean-François Millet (celui de L’Angélus) dans son univers normand, Jean-Baptiste Vianney au milieu des Dombes dans l’Ain.
Parmi les régions visitées, on relève également le Périgord, la Vendée (avec le village de Vairé au nord des Sables-d’Olonne), l’Alsace-Lorraine occupée par les Allemands (à travers cinq récits au contenu patriotique), le Canada francophone (deux textes), les interventions coloniales en Afrique noire et Asie (huit histoires dont deux en Chine).
Les trois derniers textes sont postérieurs à la fin de la Première Guerre mondiale, car c’est l’édition de 1923 qui est reproduite ici, toutefois en l’absence d’un texte autour de Pasteur et avec un récit supplémentaire. Le livre, étant destiné à des élèves de fin de scolarité primaire, bénéficie d’une très riche illustration.
Pour tous publics Beaucoup d'illustrations