Avis de Adam Craponne : "Wilson, député de Loches, a des décorations plein les poches"
Ce récit est en lien avec un des premiers scandales de la IIIe République. En effet si Mac-Mahon démissionne en 1879 parce que les républicains, devenus majoritaires, l’exigent, Jules Grévy le second président de cette IIIe république quitte l’Élysée parce que son gendre Wilson vendait des légions d’honneur. Cette démission date de 1887 et l’action de l’ouvrage "Les jardiniers du silence" court sur 1886-1887. Les lieux évoqués sont la capitale de la France, le Puy-de-Dôme et de façon marginale la Haute-Loire et Lyon. Bien que ce scandale ne soit en rien lié à la franc-maçonnerie, le choix a été fait par Monique Molière de nous le faire vivre à travers les réactions des frères trois points.
Près de vingt ans plus tard par contre ces derniers seront mis en cause pour le regard qu’ils exercent sur les promotions des officiers supérieurs. C’est le scandale des fiches et dans "14-18 Étions-nous bien défendus ?" (chez le même éditeur), l’historien Jean-Claude Flament explique bien les tenants et les aboutissements du scandale des fiches qui éclate en 1904 et vise au départ le général André. "Les jardiniers du silence" permettent de rencontrer en particulier Jules Ferry, Anatole France et Maître Philippe. Ce dernier, aujourd’hui largement méconnu, est le guérisseur le plus célèbre de l’Europe entière. Avant que Raspoutine ne s’occupe du tzarévitch hémophile, Maître Philippe quittait parfois de Lyon pour se rendre à la cour de Saint-Pétersburg afin de s’occuper de l’héritier hémophile de la couronne russe. Le fond historique est bien dominé par l’auteure. L’intrigue est bâtie autour d’une suite de catastrophes qui frappent un comte auvergnat rallié à la République. Rappelons que la noblesse de la famille d’Estaing actuelle est discutable, mais que dans le milieu de ce dernier on n'en rallia que plus facilement la République après 1870 qu'Agénor Bardoux était déjà républicain sous le Second Empire.
Alors que le lecteur pense avoir compris, vers le milieu de l’ouvrage, d’où venait la source des malheurs qui frappaient le héros, l’action est rapidement relancée. Outre que de pointer l’importante immigration allemande en France sous le Second Empire, le récit offre la description de deux espaces assez insolites. Le premier est une loge maçonnique fréquentée par Jules Ferry et le second est la maison close de luxe "Le Chabanais" (non loin du musée du Louvre). Le comte de Beaufort est reçu dans ces deux lieux, comme le personnage fictif du député de Clermont-Ferrand. Les deux hommes entretiennent des relations complexes. Voilà un roman historique à dimension quelque peu policière (enlèvement, incendie criminel, meurtre au programme) d’une grande acuité.
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