Avis de Octave : "La double appartenance de l’Alsace au XXe siècle"
Le Haut-Rhin est un département qui ressuscite en 1919 (ne retrouvant pas toutefois Belfort et sa petite région) puis disparaît de nouveau entre 1940 et 1944. En effet cet espace du sud de l’Alsace, en partie frontalier de la Suisse et où la Réforme n’est présente qu’à Mulhouse (d’ailleurs alliée des cantons suisses jusqu’en 1798) et dans la vallée de Münster (comme un fait divers à Breitenbach en 1906 le signale). Les limites de cet ouvrage sont que l’auteure ne travaille que sur la presse de l’époque pour les périodes de paix et qu’en conséquence on n’a pas la suite des évènements. Pourtant n ne doute pas que Lucie Jouvet-Legrand aurait pu compléter ses informations. Ainsi à propos de la collection de voitures des frères Schlumpf, pour les lecteurs de l’intérieur (comprendre les Français qui n’habitant pas en Alsace) et même nombre de Haut-Rhinois on aurait gagné à préciser que le Musée de l’automobile de Mulhouse ouvre en 1982 après que la justice ait tranché sur la question.
Les évènements couvrent une période allant de 1900 à 2014. On ouvre sur un accident de tramway à Mulhouse. Pour la Belle Époque, on a très peu de problèmes liés à la question des relations des Alsaciens avec la France ou sa langue. Rien autour de Hansi par exemple. On rappelle toutefois qu’en 1906, dans la seule Alsace-Lorraine et pas dans le reste de l’Empire allemand, les prénoms français sont interdits. En 1916, en pleine guerre, ce sont des noms de rues renvoyant à des villes ou personnalités françaises qui sont changés. On aurait pu signaler en plus que la rue du Sauvage, principale voie commerciale de Mulhouse, devient l’avenue Adolf Hitler durant la Second Guerre mondiale.
On peut regretter qu’autour de l’atterrissage de Pégoud à Wildenstein (dans la vallée de la Thur), rien ne soit expliqué de la présence française constante dans quatre-vingt-onze communes du sud de l’Alsace (Sundgau et Vosges alsaciennes) entre 1914 et 1918. Si l’auteure avait travaillé sur les deux journaux principaux de Belfort, elle aurait pu trouver des faits significatifs. Signalons en particulier le passage cérémonieux du certificat d’études, suite à une préparation réalisée par les nouveaux instituteurs (dont certains appelés) et institutrices (principalement des religieuses). Autour de la Première Guerre mondiale, on a aussi un évènement en 1915 qui évoque le bombardement du village de Lutterbach et un combat aérien en 1916 au-dessus de Mulhouse. Dans le domaine de la société cicile, pour 1917 on trouve un texte autour des réquisitions et des incitations à donner certaines choses, ainsi apprend-on que les cheveux serviront à fournir des courroies.
Les maladresses de l’administration française et la question du maintien du Concordat dans l’Entre-deux-guerres sont illustrés en particulier par la grève des écoliers en 1925. On apprend que dès mars 1933 des murs de Colmar sont couverts de croix gammées. Les conséquences de l’annexion de fait de l’Alsace au Reich de 1940 à 1944 sont largement illustrées (avec un cas en 1944 renvoyant à la politique d’eugénisme), sans oublier par ailleurs que le général Giraud, au cours de son évasion d’un camp de prisonniers, passe par l’Alsace et couche même une nuit d’hôtel à Mulhouse. Avec 1988, année du décès d’une Juste, on revient sur cette période.
Pour les Trente glorieuses, le décès en 1965 du docteur Schweitzer est l’occasion de revenir sur l’ensemble de la vie de ce natif de Kaysesberg. Le crash de l’A320 en 1988 et un déraillement spectaculaire en 1989, une escroquerie financière en 1995 et quelques crimes alimentent en particulier les dernières pages.
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