Avis de Benjamin : "Un désir d’harmonie sociale ?"
Philippe Portier cofonde en 2021 la Vigie de la laïcité. Il est directeur d’étude à l’Ecole pratique des hautes études (EHESS) et directeur du Groupe Sociétés, Religions, Laïcités au CNRS. Charles MERCIER est professeur d’histoire contemporaine à l’université de Bordeaux. Il est membre du Laboratoire Cultures, Éducation, Sociétés (LACES EA 7437), et membre associé du Groupe Sociétés Religions Laïcités (EPHE/CNRS).
Ils ont dirigé une enquête en juin 2023 sur le rapport des 18-30 ans à la laïcité. De cette étude, il resort que les jeunes Français connaissent les principes de laïcité, et ils apprécient notamment la liberté de conscience et la neutralité de l’État. Toutefois nombre d’entre eux critiquent certaines de ses conséquences comme les interdictions de signes religieux (et notamment le voile) à l’école. Ils perçoivent là une obsession antimusulmane, alors qu’ils apprécient l’égalité et le refus des discriminations.
Peu rattachés à un culte particulier, les jeunes de 18 à 30 ans sont plus nombreux à montrer cependant une plus grande adhésion à la croyance en Dieu et à des croyances comme l’enfer et le paradis. Ce public est par ailleurs tolérant envers l’interruption volontaire de grossesse et on ne sera pas surpris qu’en la matière, dans ce public, les femmes soient plus progressistes que les hommes. L’appartenance religieuse n’est pas la seule à influencer le niveau d’attachement au principe de laïcité ; la classe sociale et le niveau d’éducation pèsent aussi dans ce domaine. Notons que les diplômés sont les plus attachés au principe de laïcité et plus tolérants que les non-diplômés.
De la conclusion, sachant que l’aléthique est le rapport au vrai ou au faux, on soulignera ce propos : « la majorité des jeunes se retrouve pour récuser trois tentations du moment présent. La tentation "émancipationniste" qui, au nom d’une idée aléthique de la raison, consiste à vouloir arracher les individus aux archaïsmes de leurs appartenances ; la tentation "identitaire" qui, adossée à une vision fixiste de l’être national, aboutit à n’accorder la pleine reconnaissance qu’à la religion chrétienne ; la tentation "différencialiste " qui ; voulant faire droit à toutes les revendications culturelles, conduit à penser la vie commune comme un simple assemblage de communautés séparés. De ce triple refus s’extrait une préférence en faveur du modèle d’intégration libérale : il revient à chacun de pouvoir faire valoir ses options spirituelles pour peu que soient respectés les principes constitutifs (liberté de conscience, refus de la violence notamment) de la démocratie constitutionnelle » (page 273).
Pour tous publics Aucune illustration
