Avis de Ernest : "Tiens, voilà de la BD par les Alsaciens, les Suisses et les Lorrains, par les Belges, y en a plus (à prononcer "+")"
Voilà proposé ici le texte des communications du colloque "Les langages du corps dans la bande dessinée" qui s’est tenu à l’École normale supérieure en octobre 2014. L’introduction situe bien l’ensemble du propos :
«(…) il ressort deux lignes de force structurant la représentation du corps dans le neuvième art. Du corps rêvé, idéal, poétique et esthétique de Lorenzo Mattotti au corps réaliste, autobiographique et photographique de Frédéric Boilet, l’écart semble grand et les possibilités multiples. Cette ligne de fracture entre le réalisme d’un côté et le rêve ou l'imagination de l’autre est un fil conducteur de l’histoire du corps dans la BD. Les corps mutants y côtoient les anatomies parfaitement académiques des héros et héroïnes dans les oeuvres de Bilal et de Moebius, comme dans les cycles de super-héros des comics américains. Parallèlement, un autre chemin se dessine : la simplification de l’anatomie qui confère aux Peanuts et autres Astérix une expressivité qui se voudrait plus spontanée. » (page 9)
Henri Garric s’intéresse aux corps dans " Vieux Bois" de Töpffer, avec d’ailleurs une très illisible reproduction d’une scène de cet ouvrage et aux formes corporelles simplifiées avec une reprise en réduction de vraisemblablement des trois-quarts d’une page paru en 1888 (ce qui rend pour une autre raison de nouveau le document peu exploitable par le lecteur) où on a affaire à des bonhommes fils de fer ainsi qu’à Trondheim (absence d’iconographie en rapport). Heureusement en choisissant assez souvent de ne reproduire qu’une seule vignette (à l’origine en noir et blanc), les autres auteurs nous offrent un document compréhensible.
La première partie est intitulée "Perspectives théoriques pour une analyse du corps en bandes dessinées", outre la communication de Henri Garric, on trouve un texte de Pascal Robert qui s’attache à pointer combien le corps du ministre est rendu en perpétuel mouvement dans l’album bien connu "Quai d’Orsay" et enfin une réflexion de Christophe Meunier à partir de l’album "La frontière invisible" de Schuiten et Peeters.
La deuxième partie se nomme "La corporéité comme principe poétique et narratif : quand le corps fait récit". Elle est composée de trois textes : Catherine Mao étudiant l’album "676 apparitions de Killoffer", Julie Gaucher se penchant sur "Blast" de Manu Larcenet et Jérôme Dutel s’intéressant à diverses adaptations en BD de "Strange case of Dr. Jekyll & Mr. Hyde de Robert Louis Stevenson.
"Corps entrouverts : la mort et la sexualité comme modalités extrêmes d’interrogation du corps" est le nom de la troisième partie où un des trois textes traite de la BD sadomasochiste ; il s’agit de celui de Bernard Andrieu qui montre comment le trait s’attache à refléter la dimension de soumission. Le traitement du corps du sportif, principalement dans les mangas, est le sujet de la quatrième partie
Enfin la dernière partie est constituée d’un entretien avec deux auteurs Frédéric Boilet et Lorenzo Mattotti. Le corps dans les productions du dernier relève quasiment de l’adaptation renouvelée du pinceau de certaines écoles ou de grands peintres (par exemple le style des expressionistes allemands ou celui du Caravage). Frédéric Boilet retravaille des images tirées de photographies ou de films.
L’ensemble de l’ouvrage propose une large palette de réflexions autour du rendu du dynamisme du corps dans la BD classique contemporaine puisque l’on passe de Töpffer à la BD érotique en passant par exemple par les super-héros. Après la lecture de cet ouvrage, on ne regardera plus du même œil les personnages des BD.
Réservé aux spécialistes Peu d'illustrations
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