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Mémoires d’un poilu breton

Mémoires d’un poilu breton
Ouest-France347 pages
1 critique de lecteur

Avis de Octave : "Un retour peu fêté pour une guerre consentie"

Les nationalistes bretons parlaient des départements de leur ancienne province comme ceux les plus frappés en pourcentage de morts par rapport aux mobilisés, les nationalistes corses leur renvoyaient d’ailleurs l’ascenseur.

En fait, une enquête récente à partir du site internet SGA / Mémoire des hommes révèle que les plus touchés par rapport à leur population en 1911 furent la Lozère avec 5,08% de décès, la Mayenne (4,48%), la Vendée (4,37%) et enfin les Côtes-d’Armor. Henri Gilles va bientôt sortir un ouvrage où il évalue, à partir de résultats corrigés de la base SGA / Mémoire des hommes, le nombre de Bretons morts pour la France entre 1914 et 1918 à 138 000 morts (tous n’ont d’ailleurs pas connus le front, comme tous les gendarmes décédés entre juillet 1914 et décembre 1919). La Bretagne comptait alors 3,2 millions d’habitants, chiffre à comparer avec les 125 070 poilus recensés sur la base SGA / Mémoire des hommes, on frôle donc globalement les 4 %. Plus un canton est rural, plus il a le malheur d’être atteint car une partie de la classe ouvrière est mobilisée dans les usines d’armement.

En 1911 les populations s’élèvent en Loire-Inférieure à 670 000, en Morbihan à 578 000, en Finistère à 810 000, en Ille-et-Vilaine à 608 000 et en Côtes-du-Nord à 606 000. Les recensés morts pour la France sont respectivement de 23 242, 23 538, 23 290, 29 190 et 25 819. Compte tenu de sa moindre population la Vendée a eu 19 167 morts et durant l’Entre-deux-guerres le projet de construire un mémorial au Mont des Alouettes se fait au nom des 18 000 morts vendéens pour la France, chiffre mal estimé mais en sens inverse.

Mémoires d’un poilu breton est un ouvrage qui a connu une autoédition en 1921 et des rééditions successives en 2006, 2009 et 2013. Le livre comprend une très brève introduction destinée à nous dire brièvement qui est l’auteur, les circonstances où ont été retrouvé un exemplaire d’un tirage à compte d’auteur réalisé en 1921 et l’intérêt de ce livre. Son auteur est né le 5 février 1895 à Langon d’un père paysan. Lui-même agriculteur avant et après la guerre, il décède en 1936. Contrairement à ce que dit la présentation de l’éditeur Mémoires d’un poilu breton ne raconte pas l’ensemble du conflit car Ambroise Harel, étant de la classe 1915, n’est incorporé qu’à la mi-décembre 1915, et ne rejoint le front qu’en mai 1915 avec le 115e RI (qui cantonnait à Mamers dans la Sarthe et Nogent-le-Rotrou en temps de paix). Par la suite il passe au 243e RI (à l’origine composé de soldats de l’Aude) et 233e RI (formé à Arras en août 1914). On voit donc que durant ce conflit, l’auteur ne côtoie guère de Bretons dans son régiment, et c’est sûrement pour cela que lorsqu’il apprend dans un régiment qu’il rencontre il y a des gars de l’arrondissement de Redon, il essaie de les rencontrer, ce qui nous vaut quelques informations sur eux. De plus il n’hésite pas à parler de tel évènement arrivé à tel endroit pour tel soldat de n’importe quel régiment, à partir du moment où il a appris une anecdote il la retranscrit.

On a une bonne approche de ce que fut la guerre des tranchées, l’auteur participe ponctuellement à des coups de main (pour faire des prisonniers destiné à renseigner l’état-major français), redoute les corps francs allemands, évoque les gaz, l’internement en Allemagne (il est fait prisonnier au Chemin des dames en octobre 1918)… Le ton est neutre, pas de récrimination contre la hiérarchie en général, quelques allusions au manque de combativité de certains régiments, bref un discours de guerre consentie. Ambroise Harel ne s’emporte justement que parce que personne n’a pris la peine symboliquement de le remercier d’avoir fait son devoir ; il réclame en vain la Marseillaise lorsque lui et ses compagnons débarquent à Dunkerque de retour de leur internement en Allemagne. Personnellement nous pensons que ce ton neutre est dû au fait que l’objectif est de rendre hommage à ses compagnons afin que leurs familles soient fières d’eux et qu’à la suite de sa scolarité primaire, il a tiré l’idée intuitive qu’un livre d’histoire était destiné à consolider le patriotisme.

Octave

Note globale :

Par - 461 avis déposés - lecteur régulier

400 critiques
04/02/18
Yann Lagadec. Littérature(s), identité(s) régionale(s) et Grande Guerre en Bretagne. Siècles, Centre d'Histoire "Espaces et Cultures", 2014
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