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Le nerf de la guerre : la longue histoire des liaisons dangereuses entre argent et guerre

Le nerf de la guerre : la longue histoire des liaisons dangereuses entre argent et guerre
Pierre de Taillac440 pages
1 critique de lecteur

Avis de Adam Craponne : "Mon maréchal des logis avec cette putain de guerre, l’argent a l’odeur du beurre rance"

Si ce n’est pas le premier livre sur le sujet des rapports entre la guerre et l’argent, c’est sûrement le premier ouvrage de synthèse écrit directement en français sur la question. En 1989 était paru "L'Or et le sang. Les buts de guerre économiques de la Première Guerre mondiale" avec pour auteur Georges-Henri Soutou, d’autres ouvrages s’étaient fortement intéressés à la façon dont l’or américain avait permis le financement des guerres de l’Espagne au XVIe siècle ou à l’endettement de la monarchie française en 1789, du fait des guerres de Louis XIV, Louis XV et Louis XVI.

"Le nerf de la guerre : la longue histoire des liaisons dangereuses entre argent et guerre" d’Alessandro Giraudo, est préfacé par Jacques Attali. Ce dernier pointe que :
« Guerres et pillage sont ainsi longtemps été des substituts à la dette pour financer les dépenses, étatiques ou autres » (page 10)

L’introduction rappelle que l’Église s’est sérieusement enrichie au Moyen-âge en imposant le premier impôt sur le revenu à savoir la dîme saladine et qu’elle a acheté assez bon marché des biens de seigneurs désirant partir en croisade.

Le livre est composé de courts chapitres d’environ dix pages qui pour 23 suivent l’ordre chronologique depuis l’Égypte antique jusqu’à la Guerre froide. Trois chapitres sont thématiques, ils s’intitulent : "Opium, diamants, or et terres rares participent au financement d’un nouveau type de guerres", "La monnaie, arme de guerre", "Les grandes places qui financent les guerres et la création des Banques centrales". On y apprend en particulier page 338 que le franc a été créé en 1360 pour payer la rançon de Jean le Bon, rançon d’ailleurs pour un cinquième par le versement par Galéace Visconti d’une somme pour avoir eu l’honneur d’être devenu le gendre du roi de France.

Le premier billet a été utilisé au XIe siècle en Chine lorsque le manque de métal empêchait un nouveau monnayage significatif. La dynastie des Song du Sud au XIIIe siècle « a été la première dans l’histoire de la monnaie à utiliser le papier comme unité monétaire légale » (page 95). Ceci face aux guerres à soutenir contre les Barbares et parmi ceux-ci les derniers sont les Mongols qui font tomber cette lignée. Bien auparavant sous les Han (vers 200 avant Jésus-Christ), pour pouvoir payer la consolidation régulière de la Grande muraille, le général Cheung Leung invente la loterie (page 115).

Parmi les questions abordées de façon chronologique, certaines permettent d’en savoir un peu plus sur des périodes historiques. Ainsi révèle-t-on au chapitre 11 que Pie II, pape de 1458 à 1464 eût comme principale préoccupation de préparer une nouvelle croisade contre des Turcs qui, après avoir pris Constantinople en 1453, continuent à grignoter la région balkanique. Du côté de la Hongrie pratiquement en première ligne, on se mobilise et une armée de secours avec pour chef un boyard roumain sauve Belgrade assiégée en 1456. Du fait de la perte de vestiges de l’Empire romain d’Orient, le prix l’alun monte en flèche (cette pierre volcanique, outre une valeur médicinale, est essentielle à la production textile et de cuir). Jules II fait rechercher ce minéral sur ses domaines et en 1461 se mêle de ce commerce afin de pouvoir financer sa croisade. Mais la comptabilité du trésorier de la Papauté est découverte truquée à sa mort et en 1464 Jules II n’a pu apporter l’aide qu’il souhaitait au roi de Hongrie Mattias Corvin et au chef de guerre albanais Georges Scanderbeg. L'ouvrage ne le dit pas mais la ville italienne d'Otrante fut occupée par les Turcs de juillet 1480 à septembre 1481 par la suite, du fait du manque de soutien apporté auparavant aux adversaires de ceux-ci dans les Balkans.

On voit Bonaparte spéculer sur la dette publique française à partir d'une banque suisse et du fait des nécessités dues à la guerre, et Napoléon créer la Banque de France pour financer ses aventures...

La France sort, monétairement de façon définitive, de la guerre au prix d'une dévaluation, engagée en 1928 par Raymond Poincaré, la valeur or du franc étant divisée par cinq. Le rentier n’est plus un personnage significatif dans la Société française.

En résumé cet ouvrage nous apprend comment les impôts, les emprunts, les butins et la création de monnaie ont financé les guerres. Le texte permet aussi d’approcher l’idée que le financement des conflits change et modernise l'économie. Vingt pages d'illustrations soigneusement choisies sont au centre de l'ouvrage.

Pour connaisseurs Beaucoup d'illustrations Plan chronologique

Adam Craponne

Note globale :

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