Avis de Alexandre : "La Tauride royaume grec devient le khanat de Crimée puis une province russe"
À partir d’une histoire vraie, le récit informe que la Crimée était très largement peuplé de Tatars musulmans avant 1864 ; en 1941 (date de l’invasion de l’URSS par Hitler) ils étaient encore près de 20%. Les mésaventures de la famille de l’auteur rappellent que des familles d’origine grecque purent émigrer à l’époque moderne en Crimée. C’est le cas ici, avec une arrivée au début du XVIIe siècle et une conversion à la religion musulmane pour pouvoir accéder aux privilèges d’une aristocratie. Il est possible que leur ancêtre fut l’Empereur byzantin Jean VI qui règne autour de 1350, soit près d’un siècle après la chute de l’Empire latin de Byzance qui ne dura qu’un demi-siècle. Un universitaire allemand (d’origine autrichienne), officier de la Wehrmacht, sauve la vie d’un membre de cette famille car il connaît très bien son histoire de l’Empire byzantin.
Ceci est une des conséquences qui amène toute la famille à fuir vers l’ouest et à fréquenter les Russes ralliés aux Allemands. Le paradoxe est que ces personnes ont participé à la résistance contre l’occupant nazi durant la première moitié de la guerre, ceci amenant à évoquer l’action des partisans soviétiques derrière les lignes allemandes.
L’ouvrage pose, individuellement et collectivement, le devenir de ces soldats qui furent livrés à Staline, à de rares exceptions. En effet ceux qui trouvèrent refuge au Liechtenstein purent y rester et d’autres soit s’évadèrent des camps de prisonniers, soit se firent passer pour des ressortissants d’autres pays (comme la Turquie). Par ailleurs c’est la vie en Crimée dans l’Entre-deux-guerres qui est approchée avec en particulier le phénomène, propre à toute l’URSS, de la dékoulakisation qui sévit de 1929 à 1933.
C’est un ouvrage très intéressant et il est dommage que la carte page 31, censée nous éclairer sur les trois parcours des personnages évoquées, soit quasiment illisible, non seulement tous les trajets sont en gris mais les fleuves aussi. S’ajoute le fait que l’on passe sur des pays coloriés en divers gris. Coloriage qui n’a d’ailleurs aucun sens, la Suède y apparaissant comme une alliée de l’Allemagne par exemple. Les frontières sont parfois de 1945 (pour la Finlande ou la Biélorussie ; la Moldavie étant roumaine en 1939) ou de 1938 (Tchécoslovaquie), quant aux frontières de la Pologne et de l’Ukraine c’est très original, l’Estonie qui existait, jusqu'en 1939, n’apparaît pas et la Mer noire a rétréci au lavage. Tout cela pour une carte de l’Europe légendée pour l’année 1939.
Heureusement la carte de la Crimée page 57, avec le début d’un périple est compréhensible. On a aussi une photo, page 49, de la famille évoquée, et il aurait été quand même peu difficile de la dater en évaluant l’âge approximatif des deux enfants. On a un tableau très intéressant, page 375, de l’évolution en Crimée du pourcentage de la population de Tatars, Ukrainiens et Russe du XVIIe au XXIe siècle. Nous laissons au lecteur le soin d’y prendre les quelques informations capitales que nous avons saisies. Le lecteur, un peu cultivé, sait que les Tatars de Crimée sont déportés en Asie centrale, par ordre de Staline, dans les années 1945/1946. Sont à découvrir aussi les extraits donnés, pages 383-384, du Manifeste de Prague du 14 novembre 1944 produit par des proches du général Andreï Andreïevitch Vlassov.
Pour connaisseurs Peu d'illustrations