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On les aura ! Carnet de guerre d’un poilu

On les aura ! Carnet de guerre d’un poilu
Seuil112 pages
1 critique de lecteur

Avis de Octave : "Un texte bleu horizon illustré par un dessinateur du XXIe siècle : On les aura!"

On les aura ! de Barroux est la mise en images d’un authentique journal de guerre d’un poilu anonyme tenu entre le 3 août et le 5 septembre 1914 (soit en gros la période dite de la Bataille des frontières) que Barroux avait trouvé par hasard dans une boîte en carton en compagnie d’une croix de guerre sur un trottoir parisien. D’après les informations recoupées par nous ce Parisien sert d’après nous au 82e régiment d’infanterie cantonné à Montargis et appartient de façon quasi certaine aux classes 1909 ou 1910 (celle de M. Genevoix), ce qui le rend encore plus intéressant pour les lecteurs de ce site. La mobilisation étant décrétée pour le 2 août, le récit démarre le lendemain au milieu d’un enthousiasme destiné à se rassurer sur le destin de ceux qui partent. Le futur soldat se rend à la gare de Bercy en direction de Montargis, ce qui nous vaut une représentation de cette gare du Loiret. Il part dans une caserne de Saint-Mihiel dans la Meuse au lieu habituel de cantonnement du 25e bataillon de chasseurs à pied. Ce n’est que là qu’il découvre le porte-bonheur que son épouse a glissé dans un coin de ses affaires.

C’est à Mangiennes non loin de Longwy qu’il voit les premières tombes de militaires tombés autour du 20 août et le contact avec l’ennemi se produit deux jours plus tard dans le village de Saint-Rémy situé à mi-distance de Longwy et Montmédy, en fait la première agglomération du Luxembourg belge après la frontière. Le régiment souffre des tirs de l’artillerie allemande, parfois renseignée de sa position par un avion du Reich, sans rencontrer la plupart du temps l’infanterie allemande. C’est bientôt la retraite en compagnie de civils quittant leurs demeures. Dès ce mois d’août des tranchées sont régulièrement creusées par les soldats français. Le narrateur fait partie le 26 août des derniers militaires à traverser le pont de Vilosnes sur la Meuse (au nord de Verdun) avant qu’il ne soit dynamité pour protéger la retraite. Le dernier jour du mois d’août près du village de Dun-sur-Meuse il est blessé par un schrapnel. Notre étude complémentaire du journal de marche du régiment révèle que ce jour-là un capitaine et d’autres soldats sont également blessés et qu’il y a quelques morts dans ce régiment. Notre personnage prend le train à Clermont-en-Argonne en direction de Châlons-en-Champagne puis de l’hôpital militaire d’Auxerre.

C’est dans l’inquiétude de la prise possible de Paris que s’interrompt ce récit, ce qui nous vaut à la page 87 une adaptation des caricatures alors en usage du kaiser. Toutefois ce soldat continue son travail d’écriture en collectionnant des chants en usage parmi les militaires pendant encore dix-huit mois. Ce témoignage est précieux car il dépeint l’univers qui va de la déclaration de guerre au déclenchement de la Première Bataille de la Marne (avec une participation très active du 82eRI dans cette contre-offensive) où 3 700 000 Français sont sous les drapeaux dans l’hexagone (non compris la marine et les forces d’outre-mer). L’espace géographique des combats est centré sur la zone septentrionale du département de la Meuse avec la frange frontalière belge qui la borde.

Auteur prolixe de livres de littérature de jeunesse, Barroux a réalisé ici non une BD mais une histoire illustrée (comme c’était l’usage il y a un siècle) puisque le texte du narrateur est repris intégralement par fraction sous une image. Mis à part quelques moments clés traités par une seule vignette par page, on compte de deux à quatre images par planche. Il n’y a ici ni bulles, ni onomatopées, ni symboles dessinés mais un sens intuitif du cadrage adéquat avec un style graphique assez naïf où le dessin manque volontairement de profondeur et de couleurs pour souligner que ce sont une suite de notes transpirant un ressenti brut face à des évènements vécus à l’échelle locale. Barroux utilise une mine de plomb pour rendre un témoignage original sur la Grande Guerre où le lien avec les gens aimés de l’arrière tient une place certaine quoique marquée par la pudeur des sentiments. Ce livre est très abordable par des jeunes à partir de neuf ans, même si les lycéens et adules en auront une lecture assez différente de ce roman graphique.

Octave

Note globale :

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