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Quand Staline nous affamait : récit d’un survivant ukrainien

Quand Staline nous affamait : récit d’un survivant ukrainien
Jourdan382 pages
1 critique de lecteur

Avis de Adam Craponne : "Quand on traverse l'Europe d'est en ouest"

Imaginez que vous racontiez les périples d’une famille durant la Guerre de cent ans en France et que vous marquiez ces étapes sur une carte des frontières de la France en l’an 2000, cela rendrait pas trop  compréhensible la situation des étapes. Il aurait donc fallu choisir plutôt la carte pour les frontières de 1939 et vu les circonstances rajouter une carte de l’avance maximum des troupes allemandes en Russie méridionale. En effet on suit sur une carte les déplacements de personnes entre 1929 et 1944 dans un espace qui va du nord au sud de la Biélorussie au nord du Caucase et d’est en ouest de ce même nord du Caucase à la frontière polono-ukrainienne de 1939 et la Roumanie de l’Entre-deux-guerres.

Ceci aurait d’ailleurs évité à l’auteure une naïveté page 333 autour du fait que la ville de Kamianets-Podilskyi n’était pas si proche de la frontière polono-ukrainienne comme disait son père. Ce dernier parle évidemment de la frontière de 1939 alors qu’elle béatement regarde la frontière fixée en 1945. Il est bon de préciser que le récit se poursuit en quelques pages avec un séjour en Pologne fin 1944, en Allemagne début 1945 puis en France dans la Marne fin 1945.  

L’auteure a interrogé au milieu des années 1990 son père, alors âgé de près de soixante-dix ans sur la période de sa vie où il avait entre trois et dix-neuf ans. L’action démarre donc dans la moitié de l’Ukraine orientale d’alors dans un village qui compte un nombre non négligeable de juifs et où des tziganes sont assez souvent de passage. Le grand-père du narrateur avait acheté une petite ferme grâce aux économies qu’il avait fait du temps où il était militaire.  En conséquence, ils risquent d’être victimes de la campagne de dékoulakisation. Craignant une déportation en Sibérie le père décide d’amener sa famille dans le Caucase en 1933, ils vont s’installer pour quelques années à cent-cinquante kilomètres au nord des limites de la Tchétchénie et ils rencontreront des Arméniens qui se cachent. Un nombre non négligeable d’Ukrainiens a d’ailleurs fui dans cette région du Kouban au moment de la famine de 1932-1933. Quasiment toute la famille, sauf le narrateur trop jeune, travaille dans un sovkhose.   

La famille attend sans trop de crainte l’arrivée des Allemands mais ils déchantent devant leurs pillages.  Devant l’avance des soviétiques, les Allemands forcent tous les adultes à se replier (afin qu’ils ne soient pas mobilisés par les Russes) et nos personnages passent en Roumanie. Au sujet de la connaissance des chambres à gaz, on se reportera à la page 341 où on voit des Ukrainiens méfiants quand à la mi-1944 vers Lublin les Allemands leur proposent d’aller prendre une douche, ils craignent d’aller vers une chambre à gaz. Cet ouvrage est très intéressant car ce témoignage est à la fois très significatif du vécu de nombreux habitants de l’ouest de la Russie entre 1930 et 1945 et à la fois exceptionnel.  À la fin 1933, l'Ukraine apparaît comme une des régions de l’URSS les plus touchées par la famine. Si le narrateur est bien un survivant de la famine, le titre choisi semble peu adapté à l’ensemble du contenu. Quelques photographies du narrateur et de ses parents sont heureusement proposées.     

Pour connaisseurs Peu d'illustrations

Adam Craponne

Note globale :

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